Publication dans Nature

Cancer: Découverte d’un gène favorisant l’EMT, les métastases et la résistance à la thérapie

Une nouvelle stratégie thérapeutique pour les cancers mutés au niveau de FAT1



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Les métastases, qui consistent en la dissémination des cellules tumorales dans les organes distants, constitue la principale cause de mortalité chez les patients atteints d’un cancer. Pour former des métastases, les cellules doivent quitter la tumeur primaire, circuler dans le sang, coloniser des organes distants et former des métastases distantes. Il a été suggéré que la transition épithélio-mésenchymateuse (EMT), un processus par lequel les cellules de l’épiderme se détachent de leurs cellules voisines et acquièrent des propriétés migratoires des cellules mésenchymateuses, était importante pour initier la cascade métastatique permettant aux cellules cancéreuses de quitter la tumeur primaire. Cependant, les mutations génétiques qui favorisent l’EMT ne sont pas connues.

FAT1 figure parmi les gènes les plus fréquemment mutés dans un grand nombre de cancers. Les mutations de FAT1 engendrent une perte de fonction de ce gène suggèrant que FAT1 agit comme un gène suppresseur de tumeur qui empêche le développement du cancer. Cependant, et malgré la haute fréquence des mutations de FAT1, son rôle dans le cancer est mal compris.

Dans une étude publiée dans Nature, des chercheurs menés par le Prof. Cédric Blanpain, MD/PhD, investigateur WELBIO, Directeur du Laboratoire des cellules souches et du cancer et Professeur à l’Université libre de Bruxelles, ont démontré pour la première fois que la perte de FAT1 favorisait l’EMT, les caractéristiques invasives et les métastases dans le carcinome spinocellulaire - le deuxième cancer le plus fréquent chez les humains -, le cancer du poumon – le cancer le plus meurtrier – et les tumeurs de la tête et du cou.

Ievgenia Pastushenko et ses collègues ont utilisé des modèles génétiques des cancers de la peau et du poumon, ainsi que des tumeurs humaines du cancer de la peau, du poumon, de la tête et du cou pour étudier le rôle de FAT1 dans le cancer. Les auteurs ont découvert que la perte de fonction de FAT1 favorisait un état EMT hybride, caractérisé par la co-expression des gènes épithéliaux et mésenchymateux dans les cellules tumorales. Les auteurs ont démontré que cet état EMT hybride survenant après la perte de fonction de FAT1 favorisait les métastases et était associé à de mauvais résultats cliniques chez les patients atteints de cancers du poumon. « Il était particulièrement excitant d'identifier que des mutations dans un seul gène, FAT1, favorisent un état hybride de l’EMT qui conduit à des métastases et est associé à un mauvais pronostic chez les patients cancéreux » commente Ievgenia Pastushenko, la première auteure de cette étude.

En utilisant différentes approches moléculaires, les auteurs déchiffrent les mécanismes par lesquels les mutations FAT1 favorisent l'état EMT hybride. «L'identification des mécanismes qui favorisent cet état tumoral hautement métastatique nous a permis d'identifier la résistance aux traitements médicaments et les vulnérabilités dans les cancers mutés pour FAT1. Nous avons constaté que les cancers mutés pour FAT1 sont très résistants à plusieurs médicaments, en ce compris des inhibiteurs de l'EGFR, qui sont fréquemment utilisés pour traiter les patients atteints de cancers du poumon. Plus intéressant encore, nous avons identifié que les cancers mutés pour FAT1 sont particulièrement sensibles à d'autres médicaments, parmi lesquels l’inhibiteur Src, qui sont actuellement utilisés pour traiter les patients atteints de cancer du sang. Ces résultats auront des implications très importantes et immédiates pour la thérapie personnalisée chez les patients atteints de cancers présentant des mutations dans FAT1 », commente le Prof. Cedric Blanpain, le directeur de cette étude.

Cette étude est le résultat de la collaboration fructueuse entre différents groupes de recherche et départements cliniques belges, français et espagnols. En Belgique, les équipes de la Prof. Isabelle Salmon et d’autres départements de l’hôpital Erasme, l’hôpital Brugmann, l’Institut Bordet, les Cliniques de l’Europe, la KU Leuven et la VIB ont participé à cette étude. En France, Francoise Helmbacher de l’Universités de Marseille et Manuel Thery de l’Université de Paris et en Espagne, l’Académie espagnole de dermatologie et les hôpitaux Ramon y Cajal (Madrid), Hospital Clinic (Barcelone), Hospital Clinico Lozano Blesa (Saragosse), Complejo Asistencial de Leon (Leon), Clinica Universitaria de Navarra (Pampelune), Hospital Costa del Sol (Marbella) and Instituto Valenciano de Oncologia (Valence) ont collaboré à cette étude.
Ce travail a pu être mené grâce au soutien du FNRS, du TELEVIE, du WELBIO, de la Fondation Contre le Cancer, de la Fondation ULB, du Fonds Erasme, du Conseil Européen de la Recherche (ERC) et de la Fondation Baillet-Latour.

Communiqué de presse : ULB

Illustration : Laboratoire des cellules souches et du cancer (ULB)

Références: Pastushenko et al. Nature 16 December 2020, DOI number 10.1038/s41586-020-03046-1

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